L’ONG de défense des droits humains, Amnesty International, affirme, dans un rapport publié jeudi, que des militaires ukrainiens ont mis des civils en danger en établissant des bases militaires dans des écoles et des hôpitaux et en lançant des attaques depuis des zones peuplées pour repousser l’invasion russe. Ce rapport crée de nombreuses polémiques.
Entre avril et juillet soit 4 mois, des chercheurs d’Amnesty International ont enquêté sur les frappes russes dans les régions de Kharkiv (à l’Est), du Donbass et de Mykolaïv (au Sud-Est), inspectant les sites touchés par des frappes et interrogeant des rescapés, des témoins et des proches de victimes afin de tirer leur conclusion, avance l’ONG.
Selon l’ONG, ces chercheurs ont trouvé des preuves que les forces ukrainiennes lançaient des frappes à partir de zones résidentielles peuplées et avaient établi des bases dans des bâtiments civils dans « 19 villes et villages » de ces régions.
La plupart des zones résidentielles où se trouvaient les soldats étaient situées à des kilomètres des lignes de front, note Amnesty, soulignant que d’autres options qui n’auraient pas mis en danger les civils comme des bases militaires ou des zones densément boisées à proximité étaient possibles.
“ Nous avons documenté une tendance des forces ukrainiennes à mettre en danger les civils et à violer les lois de la guerre lorsqu’elles opèrent dans des zones peuplées ”, déclare Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International. “ Le fait de se trouver dans une position de défense ne dispense pas l’armée ukrainienne de respecter le droit international humanitaire ”, indique le responsable.
Les réactions pleuvent en Ukraine
Le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, affirme jeudi dans une vidéo publiée sur Facebook être « indigné » par les accusations « injustes » de l’ONG Amnesty International. Dmytro Kouleba accuse en retour Amnesty International de « créer un faux équilibre entre l’oppresseur et la victime, entre le pays qui détruit des centaines et des milliers de civils, de villes, de territoires et le pays qui se défend désespérément ».
“ Cessez de créer cette fausse réalité, où tout le monde est un peu coupable de quelque chose, et commencez à rapporter systématiquement la vérité sur ce que la Russie représente réellement aujourd’hui ”, demande le diplomate.
D’un autre côté, le conseiller de la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak avait auparavant assuré que « les vies des gens » étaient « la priorité » et que les populations des villes proches du front étaient évacuées. Mykhaïlo Podoliak accuse Amnesty de participer à une « campagne de désinformation et de propagande » au service des arguments du Kremlin.
Plus loin, le président ukrainien a pour sa part répondu aux accusations d’Amnesty International. Volodymyr Zelensky estime que l’ONG tente d’ « amnistier l’État terroriste » de Russie.
“ L’agression contre notre État est injustifiée, invasive et terroriste. Si quelqu’un rédige un rapport dans lequel la victime et l’agresseur sont d’une certaine manière mis sur un pied d’égalité, si certaines données sur la victime sont analysées et que les actions de l’agresseur sont ignorées, cela ne peut être toléré ”, avance l’homme fort de Kiev.
Démission
La responsable d’Amnesty International en Ukraine, Oksana Pokaltchouk, a annoncé sa démission à la suite du rapport de l’ONG reprochant aux forces armées ukrainiennes de mettre en danger des civils, qui a provoqué la colère de Kiev. « Je démissionne d’Amnesty International en Ukraine », a affirmé Oksana Pokaltchouk dans un communiqué sur sa page Facebook dans la nuit de vendredi 5 août à samedi 6 août reprochant au rapport d’avoir, sans le vouloir, servi « la propagande russe ».
Oksana Pokaltchouk dirigeait depuis sept ans la branche ukrainienne d’Amnesty, ce qui en faisait l’une des figures les plus respectées dans le monde des droits de l’homme à Kiev. Après la publication, elle a dénoncé publiquement le rapport publié par sa maison-mère, en estimant que ce travail est « unilatéral » et « incomplet », et surtout qu’il a été réalisé uniquement par des chercheurs étrangers, et que la hiérarchie d’Amnesty a délibérément refusé d’y associer son équipe ukrainienne.