L’invasion des gangs armés dans plusieurs quartiers du pays a de graves conséquences sur l’économie et sur les familles. En plus d’être dépossédées de leurs biens, ces dernières se voient souvent contraintes d’abandonner leurs maisons, se retrouvant confrontées à une crise de logement sans précédent. Dans de nombreux quartiers, elles doivent fournir un casier judiciaire vierge ou présenter une référence fiable pour espérer signer un contrat de location. Des victimes ont partagé leurs calvaires avec la rédaction de Passion Info Plus.
Plusieurs quartiers de la zone métropolitaine de Port-au-Prince adoptent une attitude très stricte envers les personnes ayant fui leur domicile en raison de la violence armée et cherchant à trouver refuge. Ces dernières sont souvent stigmatisées en fonction de leur provenance.
« Fuyant la fureur des gangs à Solino, cela fait plusieurs mois que je n’arrive toujours pas à louer une maison. J’ai l’argent, mais les propriétaires refusent de louer à des soi-disant inconnus », déplore un père de famille. Il exhorte les autorités compétentes à prendre des mesures pour rétablir la normalité dans les quartiers occupés par les gangs armés.
Les choses vont de mal en pire. À force de vouloir protéger leurs quartiers contre l’intrusion des gangs armés, certains propriétaires imposent une série de conditions avant de signer un bail. Si certains exigent une personne de référence ayant vécu plusieurs années dans le quartier, d’autres demandent un casier judiciaire ou un certificat de police.
Jacqueline, 42 ans, et sa fille de 19 ans cherchent depuis plus d’un mois un logement temporaire en attendant le retour au calme dans leur quartier à Nazon. « Même à Delmas 32, je n’arrive pas à trouver une maison, car les propriétaires craignent que leurs biens soient occupés par des bandits armés, facilitant ainsi une éventuelle invasion du quartier », déplore-t-elle avec frustration.
Louis, quant à lui, s’est vu demander un casier judiciaire pour vérifier ses antécédents avant de pouvoir signer un bail à Delmas 40B. « Le propriétaire voulait vérifier mes antécédents parce qu’il disait ne pas faire confiance aux jeunes inconnus. Il a ajouté qu’un de ses voisins avait loué à deux garçons qui, ensuite, ont hébergé des criminels cherchant à prendre possession du quartier », explique-t-il.
Cette situation préoccupante devrait attirer l’attention des dirigeants sur le calvaire des personnes fuyant leur quartier en raison de l’assaut des gangs armés qui sèment la panique à travers le pays. Ces victimes appellent les autorités à prendre des mesures pour reloger les déplacés, qui ont perdu leurs maisons et leurs biens, et qui errent dans les rues sans aucun accompagnement. Elles demandent également à l’État de garantir leur droit à la sécurité et à la vie.
Les données de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) illustrent l’ampleur de cette crise. En novembre dernier, plus de 40 000 personnes ont été forcées de quitter leur foyer à Port-au-Prince en l’espace de dix jours, conséquence directe d’une recrudescence des violences. Ce chiffre porte à plus de 700 000 le nombre total de déplacés internes dans le pays.
Wallace ELIE
Crédit Photo: New York Times